Enseignement – Pour la qualification de la jeunesse ouvrière, non à la «réforme du qualifiant»!

Article paru dans le Bulletin Unité N°69 d’octobre 2022.

L’avis n° 3 du Pacte d’Excellence indiquait en 2017 que les réformes allaient engranger des économies.
-44 millions d’euros pour « définir le nouveau tronc commun » ;
-37 millions pour « revoir l’offre d’options du qualifiant » ;
-30 à -50 millions pour « optimiser les règles d’octroi du Nombre Total de Périodes Professeurs ».

En fusionnant l’enseignement professionnel et technique, le Pacte crée une filière qualifiante réduisant le nombre d’options et de classes, donc l’emploi par voie de conséquence. Les chiffres de 2017 prévoyant les économies à réaliser doivent être bien entendu revus à la hausse vu l’inflation.

Disons-le clairement, le Pacte d’excellence est une étape cruciale dans la destruction de l’enseignement pour les enfants de la classe ouvrière. Les organisations syndicales doivent-elles accompagner la « réforme du qualifiant » ou doivent-elles s’y opposer ?

A l’occasion de la modeste manifestation du 27 septembre dernier, Le Soir rapporte (26/9) : « Sans garantie d’emploi, l’inquiétude reste palpable autour de l’avenir du qualifiant. « Nous demandons la mise en place d’un véritable plan social qui permettra la remise à l’emploi des enseignants qui vont inévitablement perdre la totalité ou une partie de leur charge de cours », souligne Elisabete Pessoa (de la CGSLB-Appel, le syndicat libéral de l’enseignement confessionnel – ndlr). » Ainsi, il est avéré que le Pacte d’excellence va supprimer des emplois. Combien ? Plusieurs milliers, assurément, pour arriver aux montants d’économies attendus. Au détriment de l’enseignement des futurs plombiers, cuisiniers, ébénistes, coiffeurs ou de tous les autres futurs techniciens. Avec quel résultat ? Une diminution drastique de la qualification de la jeunesse.

Pourtant, ils nous vendent le « Pacte » avec de belles paroles. On lit par exemple : « Les gouvernements de la Fédération Wallonie-Bruxelles et de la Région Wallonne ont adopté ce jeudi 28 avril 2022 une note conjointe de réforme de l’enseignement qualifiant et de la formation professionnelle prévue par le Pacte d’excellence. L’ambition y est de revaloriser la formation qualifiante et de ne plus en faire une filière de relégation. »

Mais cela est faux car la réforme s’oppose à la qualification. « Concrètement, dès 2028, après un tronc commun de 3 ans en secondaire (le nouveau tronc commun allant des maternelles à la troisième secondaire), l’élève pourra opter soit pour la filière de transition (vers le supérieur) soit la filière qualifiante, réduite à trois ans. Dans cette filière de qualification, il n’y aurait plus de distinction entre technique et professionnel, on ne trouverait que des filières/options centrées sur l’apprentissage d’un métier. L’enseignement qualifiant étant « raboté » d’un an, son programme et son organisation doivent être revus. » Un de moins pour apprendre un métier, tel est l’objectif du « Pacte » ! Conséquence : un démantèlement des emplois et des classes.

Le gouvernement PS-MR-Ecolo de la Communauté française avance un scénario pour arriver aux économies projetées. Outre l’année en moins, ce sont les options qui sont attaquées : « Seules les options les plus porteuses d’emplois seraient conservées. Dès lors, une section qui compterait moins de 10 élèves pendant deux années de suite serait supprimée, à moins qu’elle ne soit la seule à proposer cette formation dans un rayon de 10 kilomètres. » (1) Peu  importe s’il s’agit de l’école publique ou confessionnelle d’ailleurs.

Selon les données syndicales, les mesures envisagées supprimeraient 1025 options sur 5590 (1/5ème).

En mai dernier, le CPEONS (organe des pouvoirs organisateurs communaux et provinciaux) émettait des critiques contre les réformes en cours « dont nous devons constater qu’elles répondent principalement à des considérations budgétaires et arithmétiques, s’écartant par là-même de leur indispensable mission de service public ». Mais en même temps, s’inscrivant dans l’esprit de la réforme, le CPEONS suggérait une « approche qualitative accompagnant les établissements dans l’actualisation de leur offre en temps réel à travers des mesures particulières permettant par exemple de programmer plus rapidement, mais aussi de défendre leur expertise dans un cadre d’excellence, et de faire évoluer finement leur offre face aux besoins qui se manifestent. »

Faire évoluer « finement » l’offre de formation selon quels besoins ? Selon les besoins des entreprises, bien sûr. Or, les entreprises recherchent constamment à réduire leurs coûts, à réduire les coûts salariaux et les coûts de formation. Si les besoins de jeunes qualifiés sont mesurés à l’aune des besoins de la rentabilité capitaliste, à fortiori dans les PME soumises à la domination sauvage des multinationales, alors on peut affirmer que les patrons ont besoin de moins de jeunes formés, car partout le capital cherche à économiser sur le travail humain.

Et les mesures d’économies recherchées dans l’enseignement technique et professionnel ne font que soutenir cette évolution. Dans Le Soir (17/6/22), Pol Defrère, ancien directeur d’école technique, expliquait : « Dans l’enseignement qualifiant, où les enseignants avec des titres requis sont plus rares, la pénurie a été aggravée, l’absentéisme prolongé des élèves et le décrochage ont augmenté. La déscolarisation qui en découle conduit alors à une perte de chances d’insertion sociale et crée, à son tour, d’autres pénuries, nuisant au marché du travail. »

Le front commun syndical a décidé de morceler la lutte en proposant aux affiliés des actions disséminées sur l’ensemble de l’année scolaire 2022-2023. Tout en exigeant une lutte plus concentrée et plus forte, nous continuerons à saisir toutes les occasions pour affirmer : rejet de la réforme du qualifiant ! Rejet de tous les décrets du Pacte !

Lionel Briké

(1) Plusieurs scénarios circulent pour le moment et la « méthode 10/10 » ne sera pas nécessairement celle qui sera retenue. Seul importe l’objectif budgétaire ! Toutefois, les tergiversations au sein du gouvernement sont réelles.

Complément d’information pour mieux comprendre le rôle du consultant McKinsey dans le pilotage de la « réforme du qualifiant » en Belgique francophone, un livre utile : Matthieu ARON et Caroline MICHEL-AGUIRRE : Les infiltrés, Comment les cabinets de conseil ont pris le contrôle de l’Etat en France, Allary Editions, 2022, 204 p.


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